TRAVAUX URGENTS ET RESPECT DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 37 DU DECRET DU 17 MARS 1967
Cour d’appel de PARIS – 26 février 2014
Résumé :
Le syndic mettant en œuvre des travaux urgents sans convoquer immédiatement l’assemblée générale n’engage pas sa responsabilité.
La ratification des travaux peut être effective par l’approbation des comptes à la condition que les dépenses travaux soient explicitement mentionnées.
COMMENTAIRE
Cet arrêt vient s’insérer à la suite de ceux de la 3ème Chambre civile rendu sur le sujet en date du 1er février 2005 et du 17 janvier 2007 venant préciser les conditions dans lesquelles les travaux d’urgence doivent être mis en œuvre par le syndic.
Préalablement, il est rappelé que l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le syndic se doit :
« […] d’administrer l’immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d’urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l’exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci ;
Cette disposition de la loi du 10 juillet 1965 doit être combinée avec l’article 37 du décret du 17 mars 1967.
« Lorsqu’en cas d’urgence le syndic fait procéder, de sa propre initiative, à l’exécution de travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, il en informe les copropriétaires et convoque immédiatement une assemblée générale. »
Ainsi les règles régissant le droit de la copropriété donnent pouvoir au syndic d’agir de façon autonome et sans autorisation préalable de l’assemblée générale lorsque la sauvegarde de l’immeuble ou de ses éléments d’équipement est en jeu.
Néanmoins ce pouvoir n’est pas absolu. Il est limité dans le temps et dans son étendue.
En effet, le syndic ne doit prendre que des mesures urgentes en vue de sauvegarder la sécurité des personnes et des biens.
Par ailleurs, il doit impérativement convoquer immédiatement une assemblée générale afin de faire ratifier les travaux engagés à sa seule initiative.
La question des travaux urgents pose en général un dilemme au syndic qui dans tous les cas est susceptible d’engager sa responsabilité.
En effet, si les travaux sont véritablement urgents et qu’il laisse perdurer les désordres dans l’attente d’une autorisation de l’assemblée générale lui autorisant à les réaliser, le syndic engagera par la suite sa responsabilité en cas d’aggravation des désordres.
Si le syndic estime devoir, comme en l’espèce, mettre en œuvre des travaux réparatoires, il prend le risque que l’assemblée générale ne les ratifie pas et que le syndicat l’attrait en justice en responsabilité pour avoir engagé des travaux sans autorisation.
En l’espèce, le syndic était donc irréprochable en sa qualité de professionnel dans l’exécution de son mandat car les travaux ont été jugés urgents.
Cependant, bien qu’ayant informé et obtenu l’accord du Conseil syndical, le syndic s’était abstenu de convoquer l’assemblée générale immédiatement en laissant passer un délai de 20 mois entre l’ordre de service (3 avril 2007) et la tenue de l’assemblée générale appelée à ratifier les travaux (9 décembre 2008).
Afin de débouter les copropriétaires demandeurs, la Cour d’appel de PARIS estime que le syndic n’engage pas sa responsabilité et que la ratification des travaux peut se faire au travers de l’approbation des comptes incluant les dépenses correspondant aux travaux à la condition que ces dépenses soient clairement identifiées dans les comptes du syndicat des copropriétaires.
Ainsi, la ratification a posteriori de l’action du syndic prend la forme d’une approbation des comptes alors qu’une résolution relative à la ratification des travaux engagés par le syndic sans autorisation de l’assemblée générale aurait été nécessaire en temps normal.
Cette décision doit être mise en rapport avec celle de la 3ème Chambre civile rendue sur le sujet en date 17 janvier 2007 qui considère que la ratification des travaux ne peut résulter implicitement de l’approbation des comptes par l’assemblée générale.
La Cour d’appel de PARIS pour éviter la censure de la Cour de Cassation mentionne clairement que la ligne comptable se rapportant aux travaux doit clairement être identifiée afin de faire échec à une approbation implicite.
Néanmoins, il apparaît également que l’arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation du 1er février 2005 précise que la ratification des dépenses exposées n’est pas suffisante si une assemblée générale n’a pas été immédiatement convoquée.
Il est fort à parier que la partie déboutée se pourvoira en cassation sur la base de cette dernière jurisprudence.